L'Académie Delphinale a un peu plus de deux siècles d'existence, comme une quinzaine d'autres en France, qui se créèrent dans le sillage de l'Académie française avec des décalages de l'ordre du siècle ou du demi-siècle.
Celle du Dauphiné est née de la bibliothèque de Mgr Jean de Caulet, évêque de Grenoble de 1726 à 1771. Mise en vente à sa mort, elle fut achetée par souscription publique en 1772 pour une valeur de 45.000 livres, ceci à l'initiative d'un groupe de notables cultivés qui voulaient voir Grenoble dotée d'une bibliothèque publique comme les autres grandes villes du royaume. L'achat fait, restait à en assurer la gestion et l'installation.
Portrait de Mgr de Caulet (Bibliothèque municipale de Grenoble, cote Pd09CAUL2b)
Ex-libris de Mgr de Caulet (Bibliothèque municipale de Grenoble, cote Ms.519 Rés)
Pour ce qui est de sa gestion, une assemblée générale des souscripteurs réunie à Grenoble en juillet 1772, désigna 12 de ses membres pour constituer le conseil de gestion, chiffre porté à 25 l'année suivante. Le secrétaire en était le Dr Henri Gagnon, grand-père maternel de Stendhal. Ce premier conseil de gestion fut approuvé par lettres patentes de Louis XVI en novembre 1780 sous le nom de Société littéraire, terme transformé en Académie Delphinale en mars 1789, toujours par lettres patentes du roi, pour récompenser la société de sa remarquable activité.
Lettres-patentes de Louis XVI (Bibliothèque municipale de Grenoble, cote T 283)
Le nombre des membres fut porté à 36 titulaires, résidant obligatoirement à Grenoble, et 100 associés, libres de leur résidence. Parmi les premiers titulaires, figurent Dolomieu, Servan, Condorcet, Villars, Mounier, et bien d'autres noms connus.
Mais la tourmente révolutionnaire arrêta l'activité de la jeune académie, un décret de la Convention l'ayant supprimée en 1793. Elle réapparaît en 1796 sous une forme modeste, puis en 1802 sous le nom de Société des Sciences et des Arts de la ville de Grenoble, et compte alors parmi ses membres le préfet Fourier et l'égyptologue Champollion aux côtés de Choderlos de Laclos. De nouveau mise en sommeil après les Cent-Jours, elle ne reprend vie qu'en 1836 sous l'impulsion d'un maire énergique, Hugues Berriat, et recouvre même, en 1844, son nom d'Académie Delphinale dont elle était privée depuis un demi-siècle.
En 1842, elle comporte 50 fauteuils de membres titulaires, nombre porté à 60 en 1889.
Elle est reconnue d'utilité publique en 1898 et va désormais rassembler les principaux témoins de l'histoire intellectuelle de l'Isère et du Dauphiné.
Pour ce qui est de son installation, les 40.000 volumes de la bibliothèque de Mgr de Caulet trouvèrent d'abord place dans des locaux situés dans l'ancien collège des Jésuites (l'actuel lycée Stendhal). On en voit encore l'entrée depuis le passage du Lycée, entrée toujours surmontée de l'inscription « Bibliothèque publique ». Il y avait là une enfilade de quelques salles, dont l'une servait de salle de réunion.
Puis l'ensemble fut transféré dans le Musée-Bibliothèque de la place de Verdun, construit en 1870. Là aussi, l'espace finit par manquer si bien que l'Académie dut se résigner à se séparer de la bibliothèque, par ailleurs dotée depuis longtemps de sa propre administration. Elle se réunit dans plusieurs locaux successifs dépendant de la Caisse d'Epargne de Grenoble avant de s'installer aux Archives départementales, tandis que la bibliothèque municipale (aujourd'hui Bibliothèque d'Étude et du Patrimoine) était transférée en 1970 dans ses locaux actuels du boulevard Maréchal-Lyautey.
En 2020, l'Académie quitte les Archives départementales de l'Isère, et installe son siège au Musée dauphinois.